Les émotions genrées dans le cadre de la ratifications du traité de Cateau-Cambrésis

[Extract] Le traité de Cambrai a longtemps été célébré comme le fruit du travail de femmes puissantes, comme en témoigne son appellation populaire, la « paix des Dames ». Cette désignation, qui souligne le rôle central de Marguerite d’Autriche (fig. 1) et de Louise de Savoie (fig. 2) dans les négociations pour le compte de l’empereur de Habsbourg, Charles Quint, et du roi de France, François Ier, était tout aussi présente dans les chroniques, les poèmes et les gravures contemporaines, sur les médailles commémoratives, comme dans les documents épistolaires des protagonistes politiques féminins et masculins. L’historienne Jane de Iongh reflète le point de vue habituel des spécialistes en qualifiant le traité de « triomphe de la diplomatie féminine sur la force des hommes1 ». Dans cet essai, je souhaite explorer la manière dont les émotions, en tant qu’expressions textuelles et performances corporelles, se sont avérées indispensables au développement et à la ratification du traité, notamment parce qu’elles étaient rédigées en termes genrés. Je soutiens que la construction des émotions fondée sur le genre – qui fut essentielle au traité de Cambrai – recèle des messages importants sur la perception des aptitudes respectives des hommes et des femmes pour l’engagement politique.